Il y a cent ans, le huit décembre 1910, arrivait à Matane, de Sainte-Flavie-Station une puissante locomotive attelée sur trois wagons de passagers. C’est ainsi que débutait le service ferroviaire Matane – Mont-Joli. Le train de wagons de marchandise était prévu pour le prochain voyage. Le voyage simple devait durer environ deux heures et quinze minutes compte tenu des arrêts fréquents aux gares le long du parcours et il y avait possibilité de faire deux voyages aller- retour par jour.
La construction des infrastructures, débutée le premier mai 1909, fut terminée le sept décembre 1910 sur un parcours de 36 milles soit environ 60 kilomètres. C’est un exploit si l’on considère que des travaux importants furent effectués à plusieurs endroits, mentionnons : deux ponts de fer dont l’un construit sur la rivière Métis à Price et l’autre à Rivière-Blanche, un monticule de pierre qui dut être coupé au pic et à la pelle à Baie-des-Sables en plus de la construction d’une citerne à eau approvisionnée par éolienne; un pont à tréteaux aussi appelé tracel à Tartigou; la Coupe à Russell qui dut être réalisée avec une pelle hydraulique chauffée au charbon et la construction à Matane, d’une deuxième citerne pour alimenter les locomotives à vapeur. De plus, cinq gares furent construites le long du parcours soit à Price, Métis, Baie-des-Sables, Rivière-Blanche et Matane.
La venue du chemin de fer constituait à l’époque une amélioration importante dans les communications pour Matane et sa région surtout en hiver. Le fleuve étant gelé près de cinq mois par année, le transport par bateau était paralysé à cette période de l’année et les routes n’étaient pas praticables. Matane était donc isolée pendant les mois d’hiver. Le chemin de fer constituait donc le moyen par excellence pour briser cet isolement. Mais, si l’on fêtait à Matane en décembre 1910, le chemin pour y parvenir avait été long. Depuis 1876, le Chemin de fer Intercolonial reliait Rivière-du-Loup à la Matapédia via Mont-Joli. À Matane, on aurait bien voulu être desservi à cette époque. Durant cette période de trente ans, on demanda quatre chartes de compagnies avant que la compagnie Canada & Gulf Terminal Railway entreprenne finalement le travail de construction en 1909 avec l’ambition de relier Gaspé par le nord de la Gaspésie mais le chemin de fer s’arrêta finalement à Matane.
On fête aujourd’hui, les cent ans de l’activité ferroviaire à Matane avec fierté car le chemin de fer continue à vivre à Matane. Il assure le transport des marchandises pour les usines de Matane. Grâce à l’initiative d’hommes d’affaires visionnaires, la compagnie COGEMA exploite depuis janvier 1978 un traversier-rail entre Matane et la Côte-Nord. Ce service unique au Québec permet aux grandes compagnies forestières et minières de la Côte-Nord de transporter leurs produits par rail.
Réal Bélanger