La religion a occupé, on s’en doute bien, une place prépondérante dans la vie des Matanais d’autrefois. La preuve en est que ces gens simples et peu fortunés nous ont légué à travers leur église, un merveilleux monument qui témoigne avec justesse de leur grande ferveur. L’église Saint-Jérôme de Matane représente l’une des plus belles réussites d’inspiration Dom Bellot, style architectural qui a connu une certaine vogue dans la première moitié du 20ème siècle. Cet édifice majestueux qui semble bien enraciné dans le passé, saviez-vous que c’est la cinquième église à être érigée à cet endroit depuis la création de la paroisse Saint-Jérôme de Matane, en 1845? Au cours des quelques minutes qui vont suivre, nous allons faire un très rapide historique des églises qui se sont succédé à Matane.
Dans les tout débuts du peuplement de Matane, soit en 1822, lors d’une visite de l’évêque du diocèse, Mgr Plessis, la seigneuresse de Matane, madame Fraser, avait fait don d’un terrain et d’une bâtisse, probablement une grange ou un hangar, lequel devait être utilisé pour le culte, après l’avoir aménagé. Ce bâtiment a ainsi servi de chapelle jusqu’en 1839, alors qu’on a construit la première église en bois. La population augmentant ainsi qu’une certaine aisance firent en sorte qu’on eut tôt fait d’en vouloir une en pierre, ce qui fut fait en 1858. Mais cette nouvelle église s’est avérée défaillante au niveau de ses structures, en plus d’être frappée par la foudre, en 1871 : il a fallu se résoudre à la démolir et à en construire une autre juste à côté, en 1886, en utilisant les mêmes pierres.
Cette troisième église n’était pas encore finie de l’intérieur qu’elle devint trop petite pour desservir la population toujours croissante de la paroisse qui couvrait encore à cette époque un territoire qui englobait les actuelles paroisses de Saint-Luc et Saint-Victor. On entreprit donc, en 1905-1906, des transformations majeures à l’église : on démolit la partie avant et le chœur, on rallongea l’église du tiers de sa longueur initiale, puis on aménagea des jubés latéraux sur toute la longueur de l’église. Pour la première fois dans toute l’histoire des églises de Matane, l’intérieur de la nouvelle église, la quatrième, était entièrement aménagé et décoré.
Cette nouvelle église permettait alors d’accueillir environ deux mille personnes. Malheureusement, un incendie provoqué probablement par une défectuosité dans le système de chauffage la détruisit en décembre 1932, de sorte qu’il a fallu en bâtir une autre, la cinquième, ce qui fut réalisé en 1933, et c’est celle qui existe actuellement.
On ne peut s’empêcher de voir, à travers toutes ces péripéties et ces rebondissements, une belle leçon de foi, de courage et de ténacité de la part d’une collectivité, somme toute, peu fortunée.
Claude Otis